Rachid M’Barki et BFM TV, c’est terminé. La chaîne a annoncé à ses salariés le licenciement du journaliste, présentateur du Journal de la nuit (minuit – 4h30), ce jeudi 23 février 2023, un peu plus d’un mois après avoir été alertée de la diffusion de contenus liés à une campagne de désinformation, menée par une société basée en Israël. Marc-Olivier Fogiel, directeur de BFM TV, explique qu’un audit interne a permis “d’identifier plusieurs séquences, entre 2021 et 2022, qui ont été diffusées sans respect des process de validation et de la ligne éditoriale.” En conséquences de quoi le quinquagénaire a été licencié, après 18 ans d’antenne sur la “15”. Une plainte contre X pour corruption passive et abus de confiance a par ailleurs été déposée le 22 février par la chaîne. Silencieux depuis le début de l’affaire, Rachid M’Barki avait simplement affirmé à Politico (lire plus bas) que les informations diffusées “étaient toutes réelles et vérifiées”. Celui qui présentait également “Faites entrer l’accusé” (dont il a également été évincé) est-il un acteur ou une victime ?Qu’est-il reproché à à Rachid M’Barki ?Suspendu depuis le 11 janvier puis licencié le 23 février, le journaliste de BFMTV Rachid M’Barki a fait l’objet d’une enquête interne en raison de la diffusion, à plusieurs reprises, des brèves et des images biaisées sur l’antenne, a révélé Politico début février. Ces sujets étaient fournis “clés en main pour le compte de clients étrangers” par “Team Jorge”, une société basée en Israël, objet d’une longue enquête de la part d’un consortium de journalistes internationaux, dont certains du Monde et de Radio France. Les sujets étaient envoyés pour une diffusion contre rémunération selon l’enquête. Les séquences visées dans l’affaire de Rachid M’Barki ont trait au Maroc et la revendication décriée du Sahara occidental, aux oligarques russes privés de yacht à Monaco ou encore au Qatar et au Cameroun. Des pays et des individus qui auraient pu faire appel aux services de Team Jorge. Quelles élections auraient été influencées par Team Jorge ? Une enquête internationale a mis au jour l’existence d’une obscure entreprise basée en Israël soupçonnée d’avoir influencé des élections par des campagnes de désinformation. Quels scrutins sont concernés ? Et de quelle manière ? Auprès de Politico, l’homme a reconnu avoir “utilisé des infos qui [lui] venaient d’informateurs” et qui n’ont “pas forcément suivi le cursus habituel de la rédaction”. En l’état, les sujets visés n’auraient jamais été validés par la direction et ils ne l’ont pas été. Pour contourner la hiérarchie et l’approbation de la rédaction en chef, Rachid M’Barki “s’arrangeait pour demander (des) images en dernière minute […] une fois que le rédacteur en chef était pris sur une autre tranche et avait validé l’ensemble de son journal”, selon les explications de Marc-Olivier Fogiel, invité sur France Inter le mercredi 15 février.BFMTV était-elle au courant de la campagne de désinformation ?La direction de la chaine d’information s’est immédiatement dédouanée dans cette affaire. “Il n’y a pas de doute que BFM est victime dans cette histoire, quand l’un des nôtres court-circuite la chaîne hiérarchique, ça pose problème “, a lancé le patron du média qui estime qu’il ” n’y aurait pas de complicités internes “. Et à Hervé Beroud, directeur général délégué d’Altice média, d’enchérir auprès de Politico : “Nous ne pouvons tolérer aucune suspicion sur le travail de l’ensemble de notre rédaction et de nos 300 journalistes”.Rachid M’Barki concède une “erreur de jugement”De son côté, Rachid M’Barki reconnaît avoir diffusé les images en se passant volontairement de l’aval de la direction mais nie faire partie de l’opération de désinformation. Le journaliste, bien qu’ayant accepté de diffuser des brèves sur demande, assure avoir vérifié la fiabilité des sources. Selon lui, les informations “étaient toutes réelles et vérifiées, je fais mon métier. […] Je n’écarte rien, peut-être que je me suis fait avoir, je n’avais pas l’impression que c’était le cas ou que je participais à une opération de je ne sais quoi sinon je ne l’aurais pas fait.” Au regard des révélations sur la campagne de désinformation, le présentateur a concédé une “erreur de jugement journalistique” devant sa direction. Pour sa part la chaine d’informations a regretté un “libre arbitre éditorial […] suffisamment problématique pour [lancer] un audit interne”.Qui fournissait les informations biaisées à Rachid M’Barki ?C’est pour “rendre service à un ami” que Rachid M’Barki a diffusé des informations au nez et à la barbe de la direction de BFMTV. Le journaliste n’a pas rechigné a donné l’identité de ce proche : Jean-Pierre Duthion. Connu dans l’univers médiatique, l’homme a vécu en Syrie entre 2007 et 2014 et servait de fixeur aux reporters. Aujourd’hui, Jean-Pierre Duthion se présente comme un “lobbyiste” et assume être à l’origine de l’envoi des informations contestées sur BFMTV, une mission confiée par un commanditaire dont il dit ne rien savoir mais qui pourrait bien être Team Jorge. “Je reçois des missions sans connaître le client final. C’est très cloisonné. Je ne me pose pas de questions. Je fais ce qu’on me dit de faire. Moins j’en sais, mieux je me porte”, a-t-il déclaré aux journalistes de Radio France.Rachid M’Barki ne serait pas le seul à avoir été approché par Jean-Pierre Duthion. Un autre journaliste de BFMTV a fait savoir auprès du consortium que dès 2020, et de nouveau en 2023 après la suspension du présentateur phare, le lobbyiste l’a contacté précisant être “missionné pour payer des journalistes pour faire passer des informations”. Chose que dément Jean-Pierre Duthion : “Je n’ai jamais et ne rémunèrerai jamais un journaliste. Aucune preuve, aucun élément ne permet d’affirmer le contraire.” Rachid M’Barki aurait-il été payé en contrepartie des diffusions contestées ? Le journaliste ne s’est pas exprimé sur ce point.
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Publish date : 2023-02-23 12:00:00
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