Il n’y a pas que la France qui réforme son système de retraites. Alors que le gouvernement français a actionné le 49.3 ce jeudi 17 mars, la coalition gouvernementale espagnole a fait passer la sienne, le même jour, avec moins de fracas. Et sans que la rue ne déferle, pour s’y opposer. Différence de culture démocratique ? Si l’Espagne n’a pas forcément le même rapport à la contestation que la France, la réponse est ailleurs.Car leur réforme est sensiblement différente. En Espagne, pas de report de l’âge de départ à la retraite. Il faut dire que les Espagnols prévoient déjà de travailler bien plus longtemps : 67 ans, selon la législation en vigueur, qui fera effet en 2027. Soit 37,5 annuités. L’âge légal de départ avait été repoussé de deux ans en 2011 par le gouvernement du Premier ministre socialiste José Luis Zapatero, en pleine crise financière.Y est plutôt prévu : un accroissement de l’assiette de cotisation – c’est-à-dire la part du salaire sur laquelle les employés cotisent – pour mettre davantage à contribution les revenus les plus élevés. Le plafond au-delà duquel les salariés ne sont plus prélevés passe de 4 139 à 4 495 euros mensuels.Egalement : une hausse de la contribution, en particulier des employeurs, au “mécanisme d’équité intergénérationnelle”. Ce dernier alimente un “fonds de réserve” créé pour faire face aux tensions attendues lorsque la génération du “baby-boom” des années 1960-1970 arrivera à l’âge de la retraite. Enfin, le montant des pensions sera calculé soit sur la base des 25 dernières années cotisées, soit sur les 29 dernières années, en enlevant du décompte les deux années les moins bonnes. De quoi “renforcer l’équité du système et garantir la viabilité de notre système public pour les décennies à venir”, s’est félicité Pedro Sánchez lors d’une conférence de presse.Le patronat et la droite contreEn d’autres termes, c’est l’entreprise, et les plus riches, qui mettront la main à la poche. Chez nos voisins espagnols, c’est donc le patronat, et la droite (le PP) qui sont en colère, donc. Le texte a même reçu l’aval des deux principaux syndicats espagnols (UGT et CCOO). La réforme a été exigée par Bruxelles, qui menaçait de ne pas octroyer à l’Espagne 30 millions d’euros du plan de relance de l’Union européenne.Le ministre socialiste de la Sécurité Sociale José Luis Escriva n’a pas manqué de donner son avis sur la réforme française. “Faute d’avoir abordé à temps le problème et de l’avoir fait comme nous l’avons fait, elle doit maintenant adopter une approche […] qui génère une résistance sociale”, a-t-il affirmé. En l’état, “la France a un système” de retraite “qui n’est pas viable”, a également estimé le ministre interrogé à l’issue du Conseil des ministres sur les différences entre les régimes français et espagnol. La France “ne s’est pas attaquée à son système de retraite depuis des décennies”, a poursuivi José Luis Escriva en ciblant en particulier les “régimes de retraite spéciaux” que l’Espagne a supprimé pour sa part “il y a longtemps”.En France également, plusieurs personnalités politiques de gauche ont pointé la réforme comme l’exemple de l’existence d’autres voies que celle proposée par le gouvernement. “Comme quoi on n’est pas obligé de faire trimer les gens deux ans de plus !”, a par exemple tweeté l’eurodéputée Insoumise Manon Aubry, le 11 mars dernier. “Président des riches en deçà des Pyrénées, mise à contribution des hauts revenus au-delà ! Un autre choix est possible, nécessaire, impérieux”, a pour sa part salué le député Sébastien Jumel, toujours sur Twitter.
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Author : Antoine Beau
Publish date : 2023-03-17 18:48:11
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En Espagne, l’autre réforme des retraites
