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Européennes : derrière l’union des gauches, la crainte des écolos de “récupérer les miettes”

Marie Toussaint à Paris le 10 juillet 2023




Dimanche 9 juin, au quartier général des Jeunes Écologistes. Les sondages ne se sont pas trompés, contrairement à ce qu’espéraient certains responsables du parti. Et Marie Toussaint a obtenu un peu plus de 5,5 % des voix. Silence de cathédrale à l’annonce des scores. Dans la salle, les yeux sont embués. Ceux de la candidate aussi.”Face à la guerre menée à l’écologie, nous avons tenu bon mais nous reculons nettement. […] Je n’ai pas su convaincre au-delà de notre socle. Je m’en excuse sincèrement”, affirme d’une voix tremblante la tête de liste. Et d’ajouter : “Je prends mes responsabilités, et j’espère que tout le monde au sein de ma famille politique prendra les siennes.” Pour ces européennes, la candidate souhaitait mener une liste unitaire. La direction, elle, préférait la liste autonome ; la seconde option a été préférée par les adhérents. Dans l’assemblée, certains roulent des yeux à la pique de Marie Toussaint. Règlements de comptes à O.K. Corral dans 3, 2, 1…Et puis la soirée a pris une toute autre tournure. Sur les coups de 21h, les deux télés du local prennent quelques décibels. “Après avoir procédé aux consultations prévues par l’article 12 de notre Constitution, j’ai décidé de vous redonner le choix de votre avenir parlementaire par le vote”, lâche Emmanuel Macron. “La soirée était censée être consacrée aux élections européennes”, lâche, un peu interdite, Marie Toussaint. “On est dans la merde”, souffle un député européen, le pas pressé entre le bureau du QG et la pièce principale. Réunion de l’exécutif convoquée d’urgence à 22h30. 23h30, salle René Dumont, celle du conseil politique, en compagnie des parlementaires et des grands élus. “Il se passe quoi là ?” demande-t-on. “Bah on relance une campagne !”“Si le PS et les Insoumis veulent nous marcher dessus, ils le peuvent”Clémentine Autain, François Ruffin, Olivier Faure… Dans la maison verte, cet enchaînement d’appels à l’union des gauches a des allures de bouées de sauvetage. Car le rebondissement a le mérite de clore une séquence cauchemardesque. Et de remettre la famille écolo au centre du jeu de l’avenir de la gauche. Mais cette question, qui taraude les esprits les plus lucides : comment peser dans les négociations après un tel résultat ? “Évidemment que ça va jouer”, déplore Yannick Jadot. Une élue locale développe : “On ne pèse pas en tant qu’appareil politique. On reste éventuellement une forme de caution écolo parce qu’on incarne encore ça. Mais la vérité, c’est que si le PS et les Insoumis veulent nous marcher dessus, ils le peuvent.” Synthèse d’une co-listière : “On va récupérer les miettes.”Consciente du risque, la direction du parti débat actuellement des formes de l’union. Doit-elle prendre la forme d’un programme commun, ou s’agira-t-il d’un simple accord électoral ? La balance pourrait plutôt pencher vers la seconde option, afin de sanctuariser l’investiture des parlementaires verts déjà élus. “La seule solution, avec notre score, c’est de nous rouler par terre en essayant de convaincre de reconduire nos députés sortants, analyse une huile verte. En l’état, les Insoumis aussi auraient intérêt à suivre cette stratégie.” Aux manettes des négociations ces prochains jours, Marine Tondelier, mais également l’eurodéputé David Cormand, le président de la métropole de Lyon Bruno Bernard, et la patronne des écolos au Palais Bourbon, Cyrielle Châtelain.Marine Tondelier au centre des négociationsAu moins les écolos ne pourront-ils pas ruminer trop longtemps leur défaite cuisante. La pire, à vrai dire, depuis 1994, où la tête de liste “Les Verts” de l’époque avait recueilli 2,94 % des suffrages. En 2019, Yannick Jadot avait réussi à envoyer 12 députés à Strasbourg. Cette fois Marie Toussaint n’a pas su transmettre un récit harmonisé. Jamais la candidate du “pacte de non-agression” n’est parvenue à imposer sa voix dans les querelles fratricides des gauches. Et elle a rarement pris la lumière, si ce n’est à ses dépens.En réalité, les écolos avaient surtout imaginé des tas de choses pour l’interne. Certains parlementaires et élus locaux préparaient une tribune dans la presse, pour souhaiter que Les Écologistes “se professionnalisent” et deviennent “un véritable parti”, plutôt qu'”une ONG”. D’autres s’apprêtaient à fustiger “la campagne parallèle” et “concurrente” à celle de Marie Toussaint menée par Marine Tondelier, et à disséquer les relations devenues glaciales depuis quelques mois entre les deux femmes.Deux courants d’opposition interne, le “Printemps écologiste” (l’aile droite du parti) et “Ce qui nous lie” (la motion des territoires), auraient également pu donner du souffle à leur demande de congrès extraordinaire… “Pour anticiper les élections municipales, présidentielle et législatives”, écrivait-on dans les textes déposés en vue du prochain conseil fédéral. Et acter, peut-être la fin du règne de la secrétaire nationale, vers qui tous les couteaux devaient être tirés. Ironie de l’histoire, la voilà au centre des négociations, à gauche. Le bilan des européennes, et les règlements de comptes attendront.



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Publish date : 2024-06-10 05:13:37

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